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Action en responsabilité contre l’Etat : la prescription ne peut commencer à courir avant que la victime ait été en mesure d’agir

Cass. 1ère Civ., 3 septembre 2025, n°24-14.644

En cas d’action en responsabilité dirigée contre l’État en raison d’une faute du service public de la justice ayant privé une victime de la possibilité de percevoir des dommages-intérêts, le délai de prescription ne peut commencer à courir avant que la décision lui allouant ces dommages-intérêts ait été rendue, c’est-à-dire avant que la victime ait été effectivement en mesure d’agir.

En l’espèce, dans le cadre d’une enquête pénale, des avoirs avaient été saisis avant d’être restitués à la suite d’une ordonnance du juge d’instruction en date du 20 février 2017. Cette ordonnance n’avait pas été notifiée aux parties civiles qui en ignoraient l’existence et n’avaient pu en relever appel.

Ce n’est qu’à l’occasion d’une décision sur les intérêts civils, en date du 31 décembre 2021, que les victimes ont découvert la restitution des fonds. Elles ont fait assigner l’Agent judiciaire de l’Etat en vue de voir engager la responsabilité de l’Etat pour faute dans le fonctionnement du service public de la justice, à raison notamment de l’absence de notification de l’ordonnance.

Si l’article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968, prévoit une déchéance quadriennale des créances sur l’Etat, l’article 3 de ce texte précise que ce délai ne court pas contre le créancier qui ne peut agir.

C’est ce qu’a rappelé la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 3 septembre 2025 (pourvoi n°24-14.644), en cassant l’arrêt de la cour d’appel de Paris qui avait jugé prescrite l’action engagée par des justiciables contre l’Agent judiciaire de l’Etat. La cour d’appel avait retenu comme point de départ du délai de prescription, l’ordonnance de restitution litigieuse du juge d’instruction du 20 février 2017 de sorte que le délai de prescription avait expiré le 31 décembre 2021.

La Cour de cassation rappelle que la prescription ne peut commencer à courir qu’une fois la victime en mesure d’agir, c’est-à-dire à partir de la décision lui allouant des dommages-intérêts, en l’espèce ici rendue le 31 décembre 2021.

Cette décision rappelle que la prescription des actions en responsabilité contre l’État est strictement encadrée afin de protéger les victimes d’une faute de l’administration judiciaire et de leur garantir un véritable accès à l’indemnisation.